là où tu fais de la chair une surface abrasive, elle réplique :
je ne suis pas seulement là pour marcher
là où tu fais de la chair une surface abrasive, elle réplique :
je ne suis pas seulement là pour durer, et cependant
l’éternité est la seule valeur qui tienne en vie mon corps au présent
je suis
une lumière ténue
je suis une aspérité
à la face du soleil
je suis l’opéra des choses
et pas à pas
je suis ce pays défaisant pierre à pierre ses murs anciens
je suis la ruine de ses maisons vides et pas un corps n’est plus vivant que moi
je suis une incompréhension soudaine
pas plus
pas moins
je suis une très tendre incompréhension par laquelle ensemble nous accédons
à l’inédit
d’un vertige
sans maison
sans pierre
nos corps
savent très bien ce qu’ils font
toujours
nous sommes cette constellation très consciente
très concrète
et nous abolissons les espaces clos
nous sommes une rumeur des plus chaudes
nous sommes un gémissement de plaisir
dans les chambres éternelles
des grands déserteurs
nous sommes un mouvement d’amour insolent
orgueilleux
ricaneur
insouciant
et très conscient de l’état du monde
notre désertion : est très active dans le monde en son état
nos corps amoureux : sont des feux très concrets en action dans un monde sans État
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ce qui brûle
et que tu aspires
ce que tu allumes
et que tu aspires
ce néant partout par lequel rien de toi ne sombre
ce manifeste plein d’orgueil
plein de lumière
que chaque jour tu rédiges
lumière
lumière
le soleil qui n’attend pas
et si rien s’oppose à ce qui est
chaque pas de toi se fait par la joie de ne rien achever
je perds enfin le sens de la vieille orientation
je marche enfin sans lumière préalable
je m’ouvre enfin à des jours sans savoir
enfin je ne cherche plus à retrouver
je suis en feu je le sais
chaque corps qui m’approche le sait
je suis en feu
je suis heureux enfin
mon corps
sait qu’il n’est pas seul dans ce feu
mon corps
sait qu’il est en feu car un autre corps est en feu
mon corps
sait qu’il est en feu car d’autres corps sont en feu
c’est ainsi
que le monde continue de vivre
par des corps en feu qui font l’expérience d’un bonheur insolent
au plein cœur du pire